Toulouse les Orgues innove et rassemble

écrit par Serge Chauzy 20 octobre 2021 08:16

La 26ème édition de Toulouse les Orgues poursuit sa démarche d’accommodation de l’orgue dans des recettes aussi bien traditionnelles que créatives : récitals, duos avec des ensembles instrumentaux ou vocaux, en dialogue avec du cinéma, de l’accordéon, et même… de la contorsion !

Les notes et le corps

Le 12 octobre, la cathédrale Saint-Etienne accueillait le projet « Bach Metamorphosis », dans lequel la musique de Jean-Sébastien Bach, jouée par Yves Rechsteiner, entre en résonance avec l’art de la contorsionniste Lise Pauton. Ce soir-là, dans la nef gothique et ses stalles boisées, le public se rassemble autour d’une estrade entourée d’un cercle de lumière. Sur cette scène, la jeune contorsionniste, à la fois danseuse, chorégraphe et gymnaste se livre à une traduction corporelle de la musique de Bach qui émane du bel orgue en nid d’hirondelle de la cathédrale.
Aux commandes de l’instrument reconstruit par Alfred Kern, Yves Rechsteiner, le directeur artistique du festival, revisite de grandes œuvres de Johann Sebastian Bach. En quelques années, il a réalisé les transcriptions pour l’orgue des sonates et partitas pour violon seul, prolongeant ainsi une pratique courante à l’époque de Bach et plus récemment encore. Il a ainsi été amené à harmoniser et enrichir les lignes mélodiques destinées à l’instrument monodique qu’est le violon, pour l’instruments le plus polyphonique qui soit !

Le concert du 12 octobre s’ouvre sur la Sinfonia de la Partita n° 3 BWV 1006 : une entrée en matière brillante et solennelle. Suivent les étranges nappes sonores d’une improvisation qui accompagne la très lente entrée de Lise Pauton. C’est alors que s’ouvre un fascinant dialogue entre les ondes sonores de l’orgue et les mouvements d’une souplesse extrême du corps de la contorsionniste. Quatre mouvements de Sonates pour violon, transcrites pour l’instrument-roi, suscitent les interventions visuelles de Lise Pauton, comme habitée par la musique. Rien de redondant dans ces mouvements qui suggèrent plus qu’ils n’accompagnent.
Une nouvelles improvisation sous forme de nappes sonores rappelle la danseuse-chorégraphe avant la transcription des quatre premiers mouvements de la fameuse Partita n° 2 en si mineur, au cours desquels une chevelure « à la Mélisande » ponctue le déroulement de l’œuvre. La troisième improvisation déchaîne un véritable cataclysme qui introduit la phase finale de ce dialogue en forme de correspondance, au sens baudelairien du terme. Le mouvement final, la célèbre Chaconne, de la même Partita n° 2, magnifie cette conclusion en forme d’apothéose.
Ainsi s’achève ce voyage aux accents mystiques au cœur de la musique de Bach le grand.